Je vous emmène aujourd'hui en balade dans les Iles Åland (prononcer Oland) situées entre la Suède et la Finlande. Bien que placé sur le plan international sous la souveraineté finlandaise, cet archipel quasiment indépendant est une destination très prisée des suédois, pour la double raison que l'on y parle leur langue et que l'on y paye pas de taxes sur les alcools.
Jusque là, rien de spécial. Mais vous imaginez bien que si je traîne dans les parages en plein mois d'août 2012, alors que d'autres rivages aux eaux nettement plus chaudes ont généralement mes faveurs en cette période de l'année, ce n'est pas pour aller aux Åland en ATR ou en Dash-8.
En effet, dans ma quête d'oiseaux rares aux durées de vie diverses, je m'étais tourné vers la Scandinavie et un des bijoux de son patrimoine aéronautique : un splendide DC3 parfaitement préservé et maintenu en conditions de vol depuis 1982 par l'association Flygande Veteraner, portant l'immatriculation et les couleurs d'origine de la compagnie qui l'exploita sur son réseau régulier dès 1948 : SAS !
Renseignements pris plusieurs mois à l'avance auprès de l'association, il fallait d'abord faire partie de ses membres et payer une cotisation annuelle de 250 couronnes suédoises (soit 25€ environ) pour prétendre un jour avoir le privilège de voler à bord de la machine. Je fis donc les choses dans l'ordre en adhérant à Flygande Veteraner…

Puis, il fallut attendre l'opportunité d'être sélectionné pour un vol, payant bien évidemment, ce qui fût mon cas pour un aller/retour journée vers Marienhamn dans les fameuses Iles Åland le 14 août. Pas l'idéal en pleines vacances plus au sud comme évoqué plus haut, mais, bon, quand ce genre de chance se présente, mieux vaut ne pas passer son tour. J'étais donc arrivé la veille à Arlanda à bord d'un MD82 SAS, alors banal, et m'étais mis en place vers Bromma, avec "chambre avec vue" depuis le Scandic Hotel tout proche.

Le lendemain matin, enregistrement rapide devant l'aérogare et marche sous escorte vers la partie "aviation d'affaires" située à gauche du terminal. Pas de billet (la journée coûtait 2.500SEK, soit environ 250€, transferts sur place et déjeuner compris, on y reviendra) mais cette jolie carte d'embarquement en guise de souvenir.

C'est là que l'on découvre la perle rare. Il est magnifique avec sa livrée SAS immaculée et son nom de baptême d'époque "Fridtjof Viking", bien que l'association le prénomme de nos jours "Daisy", ce qui est nettement moins viril il faut bien l'avouer.

Je plaisante bien entendu. Si c'est ainsi que Flygande Veteraner veut faire la promotion de son avion sur ce petit flyer, grand bien lui fasse !

La consigne de sécurité reprend le graphisme des consignes SAS de l'époque, mais avec le nom de l'opérateur réel en lieu et place du logo SAS.

Me voilà installé au 1er rang, au hublot côté gauche. Nous mettons en route avec le bruit et les vibrations si caractéristiques du démarrage d'un moteur à pistons : ça tousse toujours un peu au début, on recommence deux ou trois fois, et ça finit alors par démarrer en lâchant un joli nuage de fumée noire. La première fois que j'ai ressenti ces sensations sur avion à pistons, c'était à bord d'un DC-6 de Balair sur un vol charter entre Bastia et Zurich en avril 1978 (à l'attention de Kilmarnock et autres footeux de ce site : 1/2 finale coupe UEFA FC Grasshoppers-SC Bastia) et ça m'avait profondément marqué.

Après un roulage court, et quelques essais moteurs à forte puissance au point d'arrêt, procédure normale sur ce genre d'appareils, nous voici "airborne" avec le spectacle classique de Bromma d'alors, et le fameux Scandic Hotel en arrière plan.

Bae146/Avro RJ, Saab SF-340 et ATR72 sont alors les avions les plus représentés ici.

On monte lentement et on peut contempler tout ça tranquillement.

Le spectacle continue avec un survol du centre ville de Stockholm, et son célèbre hôtel de ville…

Et la non moins célèbre île de Gamla Stan, avec notamment le Palais Royal.

L'ensemble réuni sur un plan plus large.

Le vol se poursuit vers l'est.


Le bonheur…

Je suis alors invité, à tour de rôle avec les autres passagers, à faire un tour dans le cockpit où les deux pilotes s'affairent dans le plus pur style de l'époque, avec un GPS en plus.

Le pilote automatique ? Une idée bien saugrenue ici. C'est les mains sur le manche et les yeux en alternance entre les cadrans et la carte que notre CdB nous emmène à Mariehamn.

D'ici la vue est encore plus belle ! Et voilà déjà les rivages de la Mer Baltique et sa multitude d'îles et d'îlots.


Retour à mon siège pour continuer à profiter du vol…

… en contemplant cet archipel quasiment infini d'îles de taille diverses et souvent habitées.

Un ferry de Viking Line qui relie Stockholm à Turku. Le voyage en bateau doit lui aussi être particulièrement agréable avec une telle météo, ce qui n'est pas toujours le cas dans la région.

On aperçoit un peu plus loin le port de Kapellskär, situé à mi-chemin de notre route du jour. C'est un port "au milieu de nulle part" qui présente l'avantage de réduire la durée de la traversée maritime pour ceux qui préfèrent effectuer le maximum de distance par la route.

Deux ferrys de Finnlines y sont amarrés.

Des îles, encore des îles…

La végétation des îles suivantes est un peu plus clairsemée.

C'est le signal du début de la descente vers Mariehamn.

Et voilà l'île sur laquelle se trouve notre destination, principale cité des îles Åland.

En approche.

Atterrissage et court roulage vers notre parking. Une autre particularité des moteurs à pistons par rapport aux turbopropulseurs c'est qu'ils s'arrêtent d'un coup, sans que les hélices continuent à tourner quelques secondes avant de se bloquer comme on y est habitué sur ATR ou autre.

N'ayant pu me déplacer en cabine pendant le vol, hormis la rapide visite en cockpit, j'attends que les 18 autres passagers aient débarqué pour immortaliser la cabine sur cette photo. Elle est totalement "dans son jus" de 1948/1957 quand l'avion fût exploité par SAS en service régulier : les sièges en version 2+2 avec revêtement tissu bleu foncé et têtières en tissu blanc, les 'porte chapeaux" ancêtres des racks à bagages cabine, garnis de couvertures rouges et de coussins, les rideaux jaune clair, et, last but not least, l'hôtesse bénévole retraitée de SAS avec un polo blanc peut-être pas d'époque mais sa veste d'uniforme suspendue sur le cintre contre la paroi semble bien, pour sa part, être une pièce originale.


J'ai ensuite le temps de faire un petit tour sur ce tarmac revêtu de bitume rouge.

Notre DC3 fait acte de déférence aux Iles Åland en arborant le drapeau national de l'archipel du côté droit du cockpit, le drapeau suédois étant déployé côté gauche.

Voilà notre DC3 en conditions "spotter" parfaites : plein profil, pas de matériel autour, exposition lumineuse optimale.

Les deux autres avions présents sur le tarmac sont ces pâles Saab SF-340. Le premier de Next Jet qui "bétonne" ici en milieu de journée. Il assurait à cette époque chaque matin et chaque soir un A/R sur Turku et un sur Stockholm-Arlanda. Les choses n'ont pas vraiment changé en 2020 puisque ce même type d'appareil effectue toujours le même programme, sous délégation de service public, mais l'opérateur s'appelle désormais Air Leap. Le deuxième est en version cargo, exploité par la compagnie lettone RAF-Avia.


Les 23 personnes constituées par l'équipage, les mécanos et les passagers de notre DC3 sont ensuite invités à rejoindre en minibus le pub Stallhagen situé à une dizaine de minutes de route de l'aéroport de Mariehamn.

L'endroit est connu pour ses bières, brassées sur place.

Voici la salle où a été servi le déjeuner, que la plupart des convives ont arrosé comme il se doit..

… avant de se diriger en terrasse pour le café (ou une autre mousse) en plein soleil. On remarquera que le public n'est pas très jeune et plutôt masculin. La plupart des membres de l'association Flygende Veteraner sont des pilotes et des mécaniciens retraités de SAS.

Retour à l'aéroport en milieu d'après-midi pour le retour vers Bromma.

Je suis de nouveau assis au 1A.

Décollage dans les délais prévus avec survol de la campagne des l'Ile de Mariehamn…

… puis c'est un virage à gauche pour remettre le cap vers le sud-ouest.

Après ce virage à 180°, panorama sur le terrain d'où on vient de décoller avec la ville de Mariehamn plus loin.

On reprend alors la même route qu'à l'aller, avec le survol d'une multitude d'îles.

Toujours les ferrys qui croisent en permanence entre Finlande et Suède.

Et des passages à basse altitude au dessus de bourgades paisibles dans ces îles où la qualité de vie doit vraiment être optimale.

Le plaisir de voler dans de telles conditions est énorme, mais les meilleures choses ont une fin et nous voici déjà dans la banlieue de Stockholm.


L'aéroport de Bromma où nous allons atterrir après ce passage en vent arrière.


"Dernier virage" mais en l'air…

On se pose après une petite heure de vol.

Le décor est le même que le matin avec Avro RJ Malmö Aviation, Saab SF-340 Golden Air et ATR72 Finncomm.

On libère la piste dans les instants suivants…

Notre DC3 se dirige alors vers le tarmac de la zone d'aviation d'affaires de Stockholm Bromma.

… où il retrouve des appareils de technologie et de construction bien plus récente que notre vénérable DC3, alors bientôt septuagénaire, mais auront-ils la même longévité que lui ?

Avant de débarquer, je fais cette photo furtive du manifeste pax de ce vol qui restera un excellent souvenir.

Voilà comment s'achève ce FR dont j'espère que la lecture vous aura diverti. Je dois alors enchaîner vers un autre vol avec un appareil insolite que l'on a aperçu sur les photos précédentes et qui sera le sujet du prochain FR.
Merci pour votre attention et pour vos éventuels commentaires.
Merci pour ce FR
Encore une expérience exceptionnelle dans cet appareil incroyablement en bon état
Une bien belle journée entre superbes vues aériennes et ce déjeuner sympathique entre passionnés
A bientôt
Bonjour et merci pour le commentaire. Plaisir pur avgeek effectivement au départ, mais une journée réussie sur le plan de l'agrément en général grâce à une belle météo et un "point de chute" sympathique à destination. A bientôt.
Merci pour ce récit Luc ainsi que pour le petit moment foot ^^
Je l'avais dit dans un de tes précédents récit, mais quelle chance d'avoir voler en DC3 pour suivre le SCB lors de son épopée européenne! C'est toujours un plaisir d'allier 2 passions à savoir le foot et l'aérien :)
Je constate que certaines de tes prises Avgeek nécessitent une préparation bien en amont, avec ici notamment l'adhésion à cette association ;)
C'est marrant, les sièges actuelles chez SAS n'ont pas tant que ça évolué depuis l'époque de ce vénérable avion ^^
De beaux survols encore une fois.
A bientôt!
"mais quelle chance d'avoir voler en DC3 pour suivre le SCB lors de son épopée... "=> Non, c'était sur un DC 6 de Balair !
Autant pour moi j'ai écrit un peu vite ^^
Merci Benjamin. C'est sûr que lorsque l'on a plusieurs centres d'intérêts, le top est de pouvoir les combiner à un moment ou à un autre, mais pour ce DC-3 suédois je me suis bien volontiers contenté du seul plaisir de l'avgeek, sachant que pour les déplacements européens de mon club de foot préféré, la décennie qui s'achève n'a pas été la plus prolixe... A bientôt.
Hello Luc
Comme dit Lagentsecret, "Encore une expérience exceptionnelle dans cet appareil incroyablement en bon état"...
Avec une météo radieuse à la clé.
Une superbe journée, avec les vols A/R et un repas, 250 € ne me semble pas énorme ! (même en 2012).
Le vol en DC6 avec Balair pour suivre l'épopée bastiaise n'était pas mal non plus, je me souviens bien de cette finale retour à Furiani, sous une pluie battante et le marécage en guise de pelouse, hélas c'est Anderlecht qui avait finalement gagné, 1 - 0 en Belgique, snif !
Une des photos montre un ferry faisant la traversée Stockholm Turku, j'avais poussé jusqu'à Helsinki, et je confirme que c'était très agréable...
Merci pour le partage, à bientôt !
Merci Hervé. Tu as raison de souligner que le rapport qualité / prix d'une telle journée est tout à fait convenable, et même peu élevé quand on sait ce que certains passionnés investissent comme sommes dans des hobbys différents, notamment dans les sports mécaniques ou nautiques... Concernant le foot, tu as presque juste sur le plan géographique : c'était à Eindhoven (le célèbre PSV) et pas à Anderlecht. Quant à l'arithmétique, une simple multiplication par 3 suffira à atteindre le vrai score... Mais tout ceci remonte désormais à il y a 42 ans... A bientôt.
Merci beaucoup pour ce très beau double FR et que dire des paysages de la mer Baltique
A bientôt
Merci pour le commentaire.
Merci pour cette pépite....
Dans la tournée des paradis fiscaux européens, il manque un appareil anglais d'avant-guerre qui irait faire un tour sur Jersey :)
Ah, cette succession de FRs pourrait effectivement laisser imaginer que je visite des îles où j'ai des intérêts financiers dissimulés aux yeux de Bercy... ce qui est loin d'être le cas car j'en profiterais si j'en avais les moyens pour m'y rendre en affrétant des avions que je souhaite prendre absolument... Merci et à bientôt.
Merci Luc pour ce nouveau FR passionnant !
Quelle belle machine ce DC-3 quand même, une bien belle journée !!
A bienôt.
Merci Stephan. Et comme on le verra dans le FR suivant, la journée ne s'est pas limitée à ce DC-3... A suivre...
Merci à nouveau pour ce FR hors des sentiers, on osé pas imaginer la myriade de FR qui prendrait tout votre temps si vous deviez publier l'ensemble des vols que vous avez effectué ahah.
À ce rythme vous allez recevoir un statut gold à vie sur FR Ahah. Un très bel avion et une association qui fait un boulot fantastique il n'y a pas à dire !
À bientôt !
Merci. La course aux statuts c'est pas trop mon truc... Sinon je ferais 2 FRs au lieu d'un seul pour cet A/R en DC-3, et je serais surtout le rédacteur le plus ennuyeux de ce site en postant des tonnes de vols domestiques français qui seraient d'une monotonie à mourir... sans parler effectivement du temps passé à rédiger, souvent bien plus élevé que la durée des vols en soi. A bientôt.
Merci pour ce FR relatant un beau vol et une bien belle journée!
Une fois encore tout cela est permis par une association de passionnés qui ne doivent pas économiser leur temps ni leur investissement personnel pour rendre accessible cette machine; un tel niveau d'engagement m'impressionne toujours.
Très belles vues au cours du vol depuis ces grands hublots carrés.
La cabine est impressionnante d'authenticité.
À bientôt!
Merci pour le commentaire. On peut effectivement imaginer que ces retraités consacrent autant de leur temps à leur association qu'ils le faisaient vis-à-vis de leur entreprise pendant leur vie professionnelle. Grâce à eux, les avgeeks peuvent avoir accès à ces moments uniques, en total décalage avec l'aviation actuelle. A bientôt.