En sortant du vol venant de St Petersbourg, on aperçoit les panneaux sortie, transit, et « salon D ». Je ne sais si nous nous sommes trompés en chemin, mais pour accéder à celui-ci, il faut passer un contrôle de sécurité, puis remonter. Le salon est au fond d'un couloir. A l'accueil, une hôtesse diplômée Haägen Dazs. Le salon est sur la gauche. Murs revêtus de pierres de parement, fauteuils massifs, disposés, comme des carrés de chocolat dont ils ont la couleur, en rangées se faisant face, perpendiculairement à l'allée centrale. Pas grand monde. Pas grand place non plus, car pour être tranquilles dans leur rangée, les passagers en bloquent l'accès avec leurs valises. Au moins, il y a une large baie vitrée au fond, donnant sur les pistes, et, sur la droite, dans le prolongement de cette baie, le buffet.
J'avance lentement ? tout le plaisir est dans l'attente ? vers ce lieu de délices, où chefs, maître-queux, tourne-broches, marmitons et gâte-sauce ont préparé force hors d??uvre raffinés et savoureux, potages, brouets, consommés, oilles, bisques, laits-de-poule confortatifs, terrines, pâtés, galantines, hure, croustades, friands, bouchées, canapés, chauds-froids, salmis, aspics et salpicons ; où crédences et consoles croulent sous les darnes, quenelles, poutargues, médaillons, filets, roulades, cassolettes, coquillages et crustacés ; où l?écuyer-tranchant se prête à la coupe des cuisseaux de veau et des cuissots de chevreuil prodigués par l'amphitryon, pendant que vol au vent, hochepots, ragoûts, daubes, matelotes, vitoulets, marinades, blanquettes, poupetons, fricandeaux et mirotons attendent impatiemment qu'on les goûte. Trou normand, trou bâlois font passer tout cela. Les effluves embaumés des rôts ? chapons, bécasses, faisans, cannettes, perdrix, lapereaux, marcassins ? se mêlent aux arômes enivrants d'un plateau où se tutoient livarot, pont-l?évêque, maroilles, vieux-Boulogne, fort-de-Béthune, époisses, munster. Des fruits muris à point, à la tendre chair juteuse et sucrée jonchent des dessertes. Entremets, croque-en-bouche, massepains, pouding, gaufres, pannequets, couques, profiteroles, rousquilles, macarons, moustacholles, font ployer un dressoir semé de berlingots d'or et de calissons longs. Profusion de vins des plus grands crus, liqueurs odorantes, hypocras et autres élixirs capiteux?
Eh bien non. Rien de rien.
Du thé sans sucrrre et du pain sec.
J'exagère : il y a aussi un fond de soupe, des pommes golden, les tranches d'un cake rassis et des petits pots de glace mövenpick. De la bière et des alcools forts. Signe des temps : on n'offre plus du pain et des jeux, mais de la gnole et du net.

Je ne peux pas photographier les toilettes, elles sont dans le couloir à l'extérieur. Je vais me rabattre sur la vue. Hum.

Il ne me reste plus qu?à mettre mes notes en ordre. Vers 17:30, nous quittons à regret cet éden pour nous diriger vers la porte A 74. Le contrôle de police (on sort de la partie D) prend du temps, même s'il n'y a que deux personnes à faire la queue au seul poste ouvert. Le policier feuillette (dans un sens, puis dans l'autre, puis repart) le passeport d'une jeune fille en observant qu'il n'y a plus aucun espace permettant d'apposer un coup de tampon. Comme il a bien regardé la première fois et que manifestement, aucune autorité antérieure n'a utilisé d'encre sympathique pour ses propres tampons, je me dis que le jeu peut durer longtemps. J'ignore comment il s'y est pris, mais, après une éternité, il lui restitue son document et la laisse passer.
Je prends encore quelques photos.




A la porte, le vol est annoncé avec un retard de 10 mn. Une bonne vingtaine de passagers font cependant la queue (l'izidjetite serait-elle une maladie contagieuse ?).

Il y a quatre rangs de sièges en classe affaires, et six passager au total. Bouteille d'eau et serviette rafraîchissante sont déjà disposées sur le siège. Rien de nouveau dans la cabine, si ce n'est un dispositif, dont je ne connais pas la fonction, qui pend du plafond, à hauteur de la cloison avant.


Il fait un temps d'addition russe. A côté de nous, un A320 de Vueling (EC-KMI)

Un 737-500 de Lufthansa (D-ABIA)

Divers Falcon 50 (?) sur le parking de la zone d'aviation privée.

Un Gulfstream V (HB-IMJ) exploité par G5 Executive

A319 Easyjet (G-EZAS) au décollage

Avro RJ100 de Swiss (HB-IYQ)

Alignement sur la piste 28

Décollage à 18:50 piste 28

Vue sur l'Oberer et l'Unterer Chatzensee.

On vire légèrement. Vue sur Zurich et son lac ; sur la gauche, le Greifensee.

Autres vues de Zurich.


Au fond, les sommets sont encore couverts de neige.

Bremgarten, et les méandres de la Reuss.

Des écharpes de brume errent sur le lac de Zug.

Hallwilersee, Baldeggersee, et plus loin sur la droite, Semparchersee.

Avant le décollage, des journaux ont été proposés. A présent que nous avons atteint notre altitude de croisière, je les déplie. Les titres ont un point commun. Il s'agit de faits dont on avait la conviction depuis plusieurs années, mais pas encore de preuve irréfutable :
- L'existence d'une particule élémentaire essentielle pour le modèle standard de la physique des particules est confirmée ;
- Il se confirme aussi que Londres est un centre névralgique du grand banditisme financier.
Les incidences de la seconde information sont plus concrètement mesurables que celles de la première : l'escroquerie liée à la manipulation du taux d'intérêt interbancaire à Londres se chiffre, en première analyse, entre 18 et 20 milliards d'euros ; mais si on tient compte des intérêts qu'auraient eux-mêmes engendrés les intérêts éludés par la manipulation, le montant devient himalayen. L'article comprend des extraits de mails échangés entre les acteurs de la fraude : « Mec, je te dois d'avoir vécu un super moment ; passe donc à la maison, je déboucherai une bouteille de champ ».


Vers 19:00, a commencé la distribution d'un repas léger : assiette anglaise avec salade de pâtes et roquette, fromage, confiture meringuée.
Il ne faut pas juger trop sévèrement la présence d'un gobelet de limonade aux côtés des tranches de viande froide. Je n'ai posé le plateau sur ma tablette que pour les besoins de la photo. En fait, je conserve la canette de sept-en-l'air et passe les plats à ma toujours-quasi-voisine. Elle a déjà englouti son assiette et attaque énergiquement la mienne : « chi tu penches chérieusement ? chlirp ? que le chystème est pourri chusqu?à la moelle ? chlurp ? et que dans moins de deux jans, on mourra touch de faim ? mgoulp ? autant commencher tout de chuite à conchtituer des régerves ? beurp. »
Ch'est pas beau ? pardon ? c'est pas beau de parler la bouche pleine.

Je me suis replongé dans ma lecture ulcérogène. Je lève le nez vers la demie, et aperçois la centrale de Nogent sur Seine.

On survole la Marne et ses étangs caractéristiques avant la Ferté sous Jouarre.


Puis, juste en avant de Meaux, Germiny l'Evêque.

Enfin, c'est l'alignement sur la piste 27R et l'atterrissage, à 19:40






La récupération des bagages prend du temps.
Swiss/ADP n'assurent pas mieux la priorité du ciel que le Vatican.
En outre, les sangles des sacs restent accrochées à une pièce en plastique, glissée sur la partie haute du carrousel, juste à l'extrémité du tapis déverseur, bloquant ainsi l'arrivée des valises qui suivent. Ce que voyant, un préposé presse le bouton « arrêt » des tapis, prévient les déchargeurs à l'aide de son émetteur récepteur, délivre le sac prisonnier, presse le bouton de remise en marche (il faut attendre encore quelques minutes). Les mêmes causes produisant les mêmes effets, le sac à dos suivant se prend dans la pièce en plastique et obstrue l'issue. Personne : le préposé a disparu (soit parce qu'il a fait son quota d'heures pour la journée, soit qu'il se lasse de faire un métier de?). Rien de plus énervant que le kling klong de ce carrousel qui tourne à vide. Que faire ? Un passager excédé grimpe sur le bord du tapis, et, tel un grizzly enjambant un torrent d'Alaska pour jeter d'un coup de patte sur la rive les saumons qui remontent, fait le grand écart et décroche le sac perturbateur ainsi que les suivants jusqu?à ce qu'il parvienne à récupérer sa valise. Entre temps les nôtres ont pu se glisser. Un FR-iste (je le suppose, qui d'autre s'en soucierait ?) suisse prend des photos de la scène. Il pourra faire pleurer de rire ses potes en démontrant preuve à l'appui que ce n'est pas demain que la France comblera son retard sur le Bengladesh.
On est contents d'arriver à la maison. Paris, ville-lumière?
Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.




Joli FR.
Le \dispositif\ qui pend du plafond est un capteur thermique qui permet de fournir de l'air chaud, ou froid selon les besoins, à l'avion par un système faisant partie du jetty et relié à l'avion par des tuyaux (jaunes à GVA). Ce qui a pour avantage de réduire l'utilisation de l'APU.
Merci pour ce FR. Le salon du D est un salon non Schengen et effectivement j'ai également passé la sécurité pour y parvenir lors de mon arrivée des USA(http://www.flight-report.com/reportage/1157.html) et la partie Senator n'est guère mieux que la Business. Encore de très belles photos aériennes. Vous n'aviez pas envie, après la lecture de cet article, d'aller bombarder la City ? ;) La collation en m'inspire vraiment pas.
@GVA380 : merci pour l'info; l'idée est intelligente.
@lagentsecret : ça serait pas bien de bombarder la city au moment des Jeux (et en plus je suis non violent). Mais si j'en ai l'occasion et le temps, je décrirai le sort qui était réservé au 15ème siècle à Padoue aux banquiers indélicats.
Merci pour cette suite toujours d'un haut niveau.
Aie aie, le salon LX est encore minable, c'est quoi cette offre ridicule, les suisses décident de benchmarker sur l'offre patio by code-barre ou quoi?
Par contre pourquoi ne pas avoir toucher le repas, il m'a l'air très bon et très complet, une spécialité LX en MC.
A bientot
@leadership: le salon D était assez décevant; comme il était peu fréquenté, je me suis dit que c'était peut-être le syndrome de la poissonnerie : s'il n'y a pas de clients, c'est pas la peine d'offrir une grande variété de poissons ultra-frais; mais si on n'offre pas une grande variété de poissons ultra-frais, les clients ne viennent pas. Le repas était sans doute très bon (d'ailleurs,il a trouvé preneur), mais j'avais comme une boule au creux de l'estomac, une sorte d'envie de tuer.
Merci pour ce FR un brin laconique !
Belles images de la Porte d'Orléans : Son ancienne gare et ce bel ensemble architectural au-dessus du terminus de bus ;-)
@verco91 : la prochaine fois, je délaierai...C'est effectivement la Porte d'Orléans, accès par le Sud au coeur de Paris. Il est question de restaurer l'ancienne gare de la petite ceinture, mais aussi de construire en face une sorte de tour faite de blocs empilés.
Merci pour ce FR !!!
J'avais bien compris, sur un FR précédent de notre très grand leader, que LX calait le niveau de la prestation en vol à celui de leur concurrent direct sur la ligne, à savoir EasyJet. Mais ce que je n'avais pas compris, c'est qu'apparemment EasyJet a ouvert un lounge à Zurich :)
Et merci pour les photos touristiques à la Porte d'Orléans ;)
Merchi pour che FR toujours bien écrit !!
J'étais plié de rire à la distribution du repas !!
@tous: merchi et à bientôt pour de nouvelles aventures
Magnifiquement écrit! Merci pour ce très bon FR!
Merci pour ce FR très bien présenté.